En bref 3 mars 2016 Élection présidentielle au Bénin: un pas en avant pour la démocratie en Afrique de l'Ouest Le Bénin va organiser le premier tour de son élection présidentielle le 6 mars 2016. Ce pays de l'Afrique de l'Ouest a déjà connu des élections démocratiques et des alternances au pouvoir depuis 1991, mais cette élection est importante à double titre: le président sortant n'y participe pas, se conformant à la constitution qui lui interdit de se porter candidat à un troisième mandat, et le résultat de l'élection est ouvert. Limitation des mandats présidentiels en Afrique de l'Ouest L'élection présidentielle au Bénin est à replacer dans son contexte régional, plus large. Le Bénin est membre de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), qui compte 15 États membres. Le progrès démocratique au Bénin s'inscrit dans une évolution positive à l'échelle de cette région, où la limitation des mandats présidentiels et l'alternance au pouvoir deviennent graduellement la règle. Les dernières étapes significatives ont été les élections au Nigéria en 2015 et la transition réussie au Burkina Faso, où la révolte du peuple a fait échouer une tentative de modification constitutionnelle en 2014 visant à permettre au président de se maintenir au pouvoir. Dans les pays de la CEDEAO, la limitation du nombre des mandats présidentiels constitue une norme constitutionnelle, à deux exceptions: la Gambie (dont le président est en fonction depuis 1994) et le Togo (où le président en est à son troisième mandat successif). La situation en Afrique de l'Ouest contraste fortement avec celle de la région voisine de l'Afrique centrale où la limitation des mandats présidentiels constitue plutôt l'exception, souffrant récemment encore de revers au Rwanda, au Congo-Brazzaville et au Burundi, ce qui démontre que la dynamique régionale est importante pour la démocratisation. Dans la CEDEAO, la limitation des mandats présidentiels a été appliquée dans la pratique dans des pays comme le Cap-Vert, le Bénin, le Mali, le Ghana et la Sierra Léone tandis que, dans d'autres, comme au Sénégal (2012), au Nigeria (2007) ou au Niger (2009), la pression populaire a été nécessaire pour faire respecter ce principe. Onze pays membres de la CEDEAO ont adopté la Charte africaine de la Démocratie, des Élections et de la Gouvernance de l'Union Africaine, qui interdit tout changement constitutionnel portant atteinte aux principes de l’alternance démocratique. La CEDEAO a rejeté dans le passé les arrangements constitutionnels en faveur de la suppression de la limite des mandats présidentiels en adoptant en 2009 des sanctions contre le Niger. En 2015, il y a eu une tentative d'adopter un accord régional limitant le nombre de mandats présidentiels à deux dans tous les pays de la communauté; la proposition a été présentée au Sommet de la CEDEAO en mai 2015, mais n'a pas abouti à cause de l'opposition du Togo et de la Gambie. Contexte béninois Le Bénin est l'un des trois seuls pays de l'Afrique de l'Ouest que l'organisation non gouvernementale Freedom House considère comme "libres". Toutefois, le parcours vers la sortie du président béninois actuel, Thomas Boni Yayi, n'a pas été dépourvu de tension. Le président Yayi a longtemps gardé le silence sur son intention d'abandonner le pouvoir et a même tenté un changement de constitution bien que celui-ci devait porter sur d'autres aspects. La forte opposition de la société civile et d'une partie de la classe politique ainsi que le rôle impartial joué par la Cour constitutionnelle ont été essentiels pour le dénouement actuel. Depuis 2012, le président Yayi a été accusé par ses opposants de tenter de manipuler la constitution pour lui permettre d'être réélu en 2016. En 2013, le Parlement s'est opposé à une modification de la constitution proposée par le président qui ne portait pas explicitement sur les mandats présidentiels. Ensuite, en novembre 2014, la Cour Constitutionnelle a bloqué tout changement potentiel de la limite des mandats EPRS | Service de recherche du Parlement européen Auteur: Ionel Zamfir, Service de recherche pour les députés PE 579.069 Clause de non-responsabilité et droits d'auteur Le contenu de ce document est de la seule responsabilité de l'auteur et les avis qui y sont exprimés ne reflètent pas nécessairement la position officielle du Parlement européen. Il est destiné aux Membres et au personnel du PE dans le cadre de leur travail parlementaire. Reproduction et traduction autorisées, sauf à des fins commerciales, moyennant mention de la source et information préalable et envoi d'une copie au Parlement européen. © Union européenne, 2016. eprs@ep.europa.eu – http://www.eprs.ep.parl.union.eu (intranet) – http://www.europarl.europa.eu/thinktank (internet) – http://epthinktank.eu (blog) FR EPRS Élection présidentielle au Bénin présidentiels, considéré comme une atteinte à l'ordre constitutionnel garanti. Le vif débat autour de ce thème a aussi impliqué la société civile, qui a organisé des manifestations fréquentes. Ainsi sont nés en 2013 "Les mercredi rouges" où les opposants au troisième mandat étaient vêtus de rouge chaque mercredi. La campagne pour les élections législatives de 2015 a été influencée considérablement par cette question. Même si le parti du président, Forces Cauris pour un Bénin Emergent (FCBE), a gagné les élections, il a perdu en popularité et ne s'est pas assuré une majorité au Parlement, obtenant seulement 33 des 83 sièges et privant ainsi le président du support parlementaire nécessaire. Ce n'est qu'en novembre 2015 que le président a clarifié qu'il ne se présenterait pas pour un troisième mandat "par respect pour la constitution". La fonction présidentielle implique des pouvoirs Répartition des sièges au Parlement béninois substantiels. Selon la constitution de 1990, le Bénin est une république présidentielle. Le président du pays est en même temps chef de l'État et chef du gouvernement, mais il peut nommer un Premier ministre même si la fonction n'est pas prévue dans la constitution. Il nomme les membres du gouvernement, fixe leurs attributions et met fin à leurs fonctions, tandis que le Parlement a un rôle plutôt symbolique: le Bureau de l’Assemblée Nationale doit émettre un avis consultatif sur leur nomination. Son mandat s'étend sur 5 ans, étant renouvelable une seule fois. La constitution est explicite sur la limitation des mandats, en stipulant qu' "en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels". L'élection du président se Source: IPU, juillet 2015. fait au suffrage universel direct et le scrutin est uninominal majoritaire à deux tours. Implication de la société civile Une plateforme électorale regroupant plus de 250 réseaux et organisations de société civile, est particulièrement active dans l'observation de la campagne électorale et dans la préparation des élections. Elle a déjà joué un rôle très important dans le bon déroulement des élections parlementaires en 2015. Dans la campagne actuelle, elle surveille les faits de violence physique et verbale, le non-respect des droits, ainsi que les fraudes et les irrégularités. Ainsi, elle a dénoncé des irrégularités dans la distribution des cartes d'électeurs. Les cartes d'électeurs n'ont pas été prêtes à temps par manque de fonds, ce qui a conduit au report des élections d'une semaine, du 28 février au 6 mars 2016. L'Union européenne (UE) offre de l'assistance technique à la Commission électorale nationale autonome pour les élections présidentielles. Une mission d'expertise électorale de l'UE est déployée actuellement à Cotonou. L'UE appuie également la plateforme électorale des organisations de la société civile du Bénin. Candidats La Cour constitutionnelle a validé 36 candidatures des 48 initialement déposées mais trois candidats se sont désistés. Parmi les 33 restés dans la course, il y a deux femmes. Les cinq candidats les plus populaires sont: Lionel Zinsou, le grand favori selon les media, est le Premier ministre en fonction depuis mai 2015, quand sa nomination a fait la surprise. Franco-béninois, il est né en France, où il a vécu pendant de nombreuses années occupant des postes dans l'enseignement universitaire, l'administration publique et les banques. On lui reproche sa trop grande proximité avec la France. Il est le candidat du FCBE (la formation du président Yayi) mais a obtenu le soutien de deux autres formations, PRD et RB, qui, depuis dix ans, ont été dans la première ligne de l'opposition au régime du président actuel. Patrice Talon est l'un des opérateurs économiques les plus puissants du pays, actif dans l'industrie du coton et dans le port de Cotonou jusqu'en 2012, où il a été accusé de tentative d'empoisonnement du président et a dû s'exiler en France. La justice l'a relaxé depuis. Sébastien Ajavon est un homme d'affaires dans le domaine agroalimentaire. Il est candidat indépendant. Pascal Koupaki est un ancien Premier ministre. Il a un profil de technocrate tout comme Lionel Zinsou. Abdoulaye Bio-Tchané est un technocrate également, économiste, ayant été dans le passé ministre de l'économie et des finances au Bénin et président de la Banque ouest-africaine de développement. Service de recherche pour les députés Page 2 of 2