AGRONOMIE – ENVIRONNEMENT Les biocarburants en Argentine : facteurs et enjeux de la production de biodiesel de soja Martine GUIBERT1 Silvina Cecilia CARRIZO2 Universite de Toulouse – Le Mirail, De partement de Geographie, Equipe de recherche « Dynamiques rurales », 31058 Toulouse cedex 09 <guibert@univ-tlse2.fr> 2 Conicet-CEUR (Centro de Estudios Urbanos y Regionales) et UNNOBA (Universidad Nacional del Noroeste de la Provincia de Buenos Aires), Argentine 1 La fabrication de biocarburants se trouve gation de valeur a au carrefour entre agre res premie res agricoles et des matie nerge tiques renouobtention de biens e e d’une production d’huile velables. Dote quente et destinee brute de soja conse a l’exportation, l’Argentine fournit ainsi, depuis 2007, la demande mondiale croissante en biodiesel de soja1. Elle a galement le souci d’ame liorer l’approe national, visionnement de son marche nerge tiques augmentant et les besoins e l’extraction d’hydrocarbures devenant insuffisante. De fait, la consommation de biocarburants est obligatoire depuis 2010, et l’objectif est d’incorporer, en 2012, 10 % de biocarburants aux duire carburants, ce qui permettra de re les importations de gaz et de gazole. Ce national est capte prioritairemarche ment par des acteurs de petite ou moyenne taille et detenteurs de quotas Key words: Argentina, biofuel, soybean biodiesel glemente s par le gouvernement argenre bouche s tin. Les de a l’exportation sont le fait d’acteurs de moyenne et grande s souvent lie s aux activite s de taille, tre trituration. gulier conduit Sur la base d’un suivi re dans le cadre de programmes universialise s taires de recherche2 (entretiens re s – depuis 2008 aupr es d’acteurs-cle producteurs, institutions, chercheurs, compilation d’informations professionmiques, revue de presse), nelles et acade flexion porte sur les raisons et les la re veloppement de la profacteurs de de nergies renouvelables en duction d’e Argentine, a travers le lancement du 2 Programmes ‘‘Landuse change, biofuels and rural development in the La Plata Basin (IAI-IRDC, 2008-2010) » et PICT Red ‘‘Impactos territoriales de las transformaciones en el n Central sector agroindustrial en la Regio Argentina. Pasado reciente y escenarios futuros.’’ (Universidad Nacional del Litoral, 2009-2011), ‘‘Proyectos de energı́a en el Noroeste de la Provincia de Buenos Aires: n regional’’ desarrollo territorial e integracio (Universidad del Noroeste de la Provincia de Buenos Aires, 2010-2011). e sur biodiesel de soja. Elle est centre l’analyse des strat egies des acteurs, les conditions de production (normes, , compe titivite , etc.) et les rentabilite bouche s. Un premier point concerne de les mesures que le gouvernement a prises la production dans le et qui ont impulse me point traite des pays. Le deuxie cificite s de la filie re du biodiesel en spe ves et Argentine, entre abondance de fe d’huile brute de soja, valorisation industrielle et atermoiements du soutien public. Le troisi eme identifie les acteurs s et les marche s concerne s3. implique Le soutien actuel de l’Etat argentin la production a de biocarburants but des ann Au de ees 2000, en Argentine, rien ne semblait pouvoir rapprocher nerge tique, monde agricole et monde e re tre s malgr e une industrie huilie 3 Nous remercions chaleureusement M. Romain Gaignard pour sa relecture attentive claires. et ses commentaires e Pour citer cet article : Guibert M, Carrizo SC. Les biocarburants en Argentine : facteurs et enjeux de la production de biodiesel de soja. OCL 2012 ; 19(3) : 184-191. doi : 10.1684/ocl.2012.0451 184 OCL VOL. 19 N8 3 mai-juin 2012 Article disponible sur le site http://www.ocl-journal.org ou http://dx.doi.org/10.1051/ocl.2012.0451 doi: 10.1684/ocl.2012.0451 active e galement sa production, Elle re sil, d’ethanol de modeste par rapport au Bre veloppement de celle canne et projette le de d’ ethanol de maı̈s et de biodiesel de canola (colza), ou encore celles de biocarburants a chets organiques. base d’algues ou de de 1 Abstract: Biofuel production in Argentina: factors and challenges of soybean biodiesel In 2006, Argentina has sanctioned a national law to regulate biofuel production and consumption. Since 2007, soybean actors started producing biodiesel for international market -especially to Europe- and the country quickly became the major biodiesel exporter. In 2010, around twenty processing units started supplying the domestic market. Diesel sold in Argentina contained 5% of biodiesel. The obligation to add 5% of biodiesel to diesel has passed to 7% and the goal is to increase this percentage. The State support and soybean biodiesel competitiveness have been important for biodiesel chain development but some doubts could appear about the kind of actors that could have the benefits. veloppeperformante et en constant de ment. L’Argentine avait cependant envisage cette articulation a la fin des annees trolier, elle a 1970. En plein choc pe le Plan « Alconafta » qui pre conilance sait l’utilisation d’alcool de canne a sente dans le nordsucre, culture pre ouest subtropical du pays (a un niveau sil). Ce plan moindre par rapport au Bre une dizaine d’annees est abandonne plus tard, au profit d’une augmentation croissante de la consommation nergies fossiles dont les prix baisd’e saient et les exportations augmentaient. Or, la structure du transport en Argentine repose sur une consommation considerable de gazole (qui confine au gaspillage nerge tique), e tant donne le fait que le e te delaisse et que le tout-routier train a e : les camions de marchans’est impose dises et les bus de voyageurs sillonnent inlassablement le pays, et avalent les tres qui se parent les centaines de kilome rentes re gions centres urbains et les diffe tres entre Buenos Aires et (1 200 kilome Mendoza par exemple). Principal carbuhicules lourds, le gazole est rant de ces ve en proportions croissantes donc importe es 2000. Pour sa part, le depuis les anne non seulement pour les gaz est prise usages domestiques et industriels mais hicules le gers (qui aussi pour les ve galement a l’essence). En effet, roulent e l’Argentine a le plus grand nombre de . Leur voitures a gaz naturel compresse te encouragee utilisation par les taxis a e es 1980 afin officiellement dans les anne de les substituer a celles qui roulent avec des combustibles petroliers liquides. Quelques essais avec des biocarburants te tente s, mais ils e taient d’enveront e e et peu valorises. gure limite quent L’Argentine aborde par conse cle avec une de pendance le XXIe sie nerge tique croissante vis-a-vis des e nergie hydrocarbures. 90 % de l’e e dans le pays (carburants consomme pour les transports et le secteur agricole, rive s de chauffage, etc.) est a base de de trole et de gaz, obtenus en grande pe partie dans le pays. Les prix au consommateur final sont subventionnes par currente et de plus l’ Etat (intervention re en plus large depuis le gouvernement de Nestor Kirchner de 2003) en grande trolie re et aux partie gr^ace a la rente pe s de la taxation a l’exportarevenus tire res premie res comme le tion des matie s d’approvisionsoja. Mais des difficulte nerge tique nement et de distribution e plaident en faveur d’une diversification des sources, en particulier dans les gions e loign re ees ou en bout de r eseaux de distribution. Les distances sont telles me engendre que le moindre proble des ruptures d’approvisionnement qui compromettent les activit es des personnes et des entreprises. nerge tiques nationales Ces deficiences e gionales ont pour toile de fond le et re bat international sur l’ de epuisement des ressources fossiles (Andrich, 2011 ; Dominicis, 2010 ; Cepal, 2009 ; World Bank, 2008). Elles plaident en faveur du remplacement d’une part importante du par des biocarburants. carburant utilise thanol pourraient Le biodiesel et le bioe re abondante, être produits de manie dentaire en matie res dans un pays exce res agricoles, export premie ees sous s ou de biens forme de commodite s (cas de l’huile faiblement transforme brute de soja et, dans une moindre mesure, du maı̈s). es 2000, Depuis le milieu des anne de l’Argentine affiche donc sa volonte devenir un important producteur de biocarburants, notamment par une politique fiscale incitative (Greenpeace, 2007). En 2001, le gouvernement lance le Plan de competitividad para el combuscret 1396) qui accorde tible Biodiesel (De alors des avantages fiscaux. Mais la crise conomique de 2001, l’e volution des e prix internationaux et nationaux rendent titifs les projets peu viables ou peu compe de production de biocarburants. En finit 2006, la loi-cadre 26093/2006 de bouch trois de es pour les biocarburants : l’exportation, le march e national (obligatoire a partir de 2010) et l’autocret 109/07 consommation. Le de permet son application et la production e chelle, de biodiesel est lance a grande e d’abord pour l’exportation. La produc national se tion pour le marche tise concre a partir de 2010, lorsque la gislation rend obligatoire l’incorporale tion d’au moins 5 % de biocarburants dans la composition des carburants vendus en Argentine (biodiesel-gazole thanol-essence). Le pourcentage a et e te rapidement e lev e e a 7 % pour le tariat biodiesel (r esolution 554 du Secre a l’Energie de juillet 2010) (Carrizo et al., 2009 ; Carrizo, 2010 ; Droulers et Carrizo, 2011). En accord avec la loi des biocarburants, s son adoption, quelques mois apre s argentin a approuv le Congre e la Loi 26.190/2006 pour la production lectricite a partir d’e nergies renoud’e e vote velables. En mai 2009, l’Assemble cret d’application (D le de ecret 562) et l’entreprise Enarsa Energı́a Argentina – cutif du ministe re de la Planibras exe fication – lance un appel d’offre a travers n de le Programme Genren « Provisio energı́a electrica de fuentes renovables » de 1 000 MW. Il est stipul e que 110 MW seront produits a partir de biodiesel. Actuellement, certaines centrales thermiques essayent d’utiliser du biodiesel lectricite 4. pour produire de l’e En janvier 2008, la loi nationale 26.334 octroie des aides aux raffineries de sucre qui commencent, en 2010, a approvi national5. Neuf sionner le marche raffineries – parmi les vingt-trois en fonctionnement – assurent le volume par le Secre tariat qui leur a et e assigne lange a l’Energie, sur la base d’un me thanol. a l’essence de 5 % de bioe res de Localis ees dans les zones sucrie Tucum an, Salta et Jujuy, a la marge des nerg grands r eseaux e etiques, quelquesmarrent aussi la ge ne ration unes de lectricit compl ementaire d’e e. glementaire Finalement, le cadre re fondamental est la loi-cadre sur les conise biocarburants de 2006. Elle pre gionales la promotion des economies re et des petits et moyens producteurs et es re. Elle annonce des des PME lie a la filie ^ ts sur les investisseexon erations d’impo alise s. Elle pre voit la re partition ments re rentes entre les producteurs des diffe gions et de taille diverse, des volumes re cessaires de biocarburants ne a l’industrie trolie re pour proce der au m pe elange. Enfin, elle r eglemente leur prix de vente. tiques et enviLes objectifs sont energe ronnementaux : incorporer de nouvelles sources locales pour la production de lectricite , et contribuer carburants et d’e a mission de gaz la diminution de l’e a effet galement e conomide serre. Ils sont e ger la facture ques et sociaux : alle nerge tique en important moins de e AES a San Nicolas, Par exemple, l’unite Province de Buenos Aires, a utilise du biodiesel pour fournir 5 % du carburant necessaire a deux machines de 265 MW de puissance (environ 6 000 m3 de biodiesel, soit 5 300 tonnes approximativement) (Pont, 2011). 5 solution 266/2008 du registre des audits ; Re solution 1295/2008 de de finition de la re ; re solution 689/2009 a propos des qualite thanol et des volumes a entreprises d’e solution 733/09, etc. fournir, re 4 OCL VOL. 19 N8 3 mai-juin 2012 185 largir la geographie des activite s gazole, e er des emplois. Ce agricoles locales et cre veloppement dernier aspect relatif au de conomies regionales (qualifiees de des e riphe riques » en Argentine) est un « pe argument de fond de la loi. Cependant, il a assez vite rendu perplexe de nombreux acteurs et observateurs. Des emplois ont te cre e s et des acteurs locaux en effet e ont pu se reconvertir vers la production nergies renouvelables comme le biod’e diesel. Mais, les petites structures de te ve ritablement type familial n’ont pas e soutenues et ont ete vite confrontees luctable de compe titivite au manque ine chelle face aux projets de grande e concentres dans les terminaux portuaires s des zones de consomou au plus pre es et des grandes mation les plus peuple villes. Nonobstant, ce cadre legislatif bouche s qui se profilent sur les et les de deux plans, national et international, ont au developpement de la capacite incite productive, d’autant que l’Argentine s importantes d’huile dispose de quantite brute de soja6. Sur la base d’une re premie re matie agricole abondante En Argentine, l’expansion de la fabrication de biodiesel de soja est au coeur du , depuis boum agricole qui s’est empare es 1990, des terres pampeennes les anne gions voisines (Villela et al., et des re s dans 2010). Traditionnellement engage les productions de viande bovine, de re ales (ble , maı̈s) et de tournesol, ce s les producteurs de la Pampa ont tre la culture du soja. Le largement adopte agineux s’est impose du fait d’un prote ne fice sans e gal en ces ^ t-be rapport cou temps d’innovations biotechnologiques netiquement modifiees (semences ge adoptees depuis la campagne 1996thodes culturales conser1997), de me vatrices (semis direct) et intensifiees (agriculture en continu), de moyens financiers accrus (investisseurs extrae a des prestaagricoles et gestion confie taires de service) et d’outils commerciaux s (Guibert, et boursiers sophistique 6 galement ses intenL’Argentine affiche e tions d’augmenter sa production d’ethanol s faibles) et de de buter de canne (quantite celle d’ ethanol de maı̈s, deux biocarburants qui ne sont pas l’objet a proprement parler de cet article. 186 OCL VOL. 19 N8 3 mai-juin 2012 2009 ; Grosso, 2009 ; Guibert et al., e de 2011). Sa production est passe 11,4 millions de tonnes en moyenne annuelle durant le quinquennat 19901994, a 16,4 entre 1995 et 1999. Elle s’envole, ensuite, avec pr es de 44 millions de tonnes obtenues en moyenne par an entre 2000 et 2004. 49 millions de te r tonnes ont e ecolt ees en 2010-2011. L’utilisation de terres pour les productales totales va augmentant : tions vege moins de 5 millions d’hectares cultiv ees en 1990-1991, plus de 10 en 2000-2001, plus de 18 en 2010-2011. Accompagn ee lioration des rendements par une ame res (2,8 t/Ha en moyenne ces dernie es), la culture de soja se fait au anne triment des autres cultures et des de quent p^aturages (confinement plus fre des troupeaux) et par conquête de ensurfaces dans les r egions extrapampe res nes (remplacement des cultures vivrie es). De fait, ou locales, et de zones boise les quatre autres cultures-cl es souffrent g de cette he emonie du soja. Elles se maintiennent bon an mal an, en ce d ebut des annees 2010, a 22 millions de tonnes , 2 environ pour le maı̈s, 15 pour le ble a 3 pour le sorgho et le tournesol. La capacit e de transformation de l’induse en Argentine trie de trituration localise n’a eu de cesse, a son tour, d’augmenter. Elle atteint, en 2011, environ 160 000 re. Elle est en tonnes de capacit e journalie grande partie concentr ee dans quelques s ge antes localise es dans les termiunite s le long du Paran naux portuaires situe a, au Nord et au Sud de Rosario, mais aussi dans des usines importantes, au coeur et au sud-ouest de la Pampa (Informativo semanal de la Bolsa de comercio de Rosario). Un tiers de l’huile brute de soja obtenue en 2010-2011 (7,1 millions de tonnes) a te consacre e e a la production de biodiesel. Cela correspond a un quart (24 %) colte argentine de fe ves de soja de la re (12 millions de tonnes) ; autrement dit, es de la la hausse de ces derni eres anne te production argentine de soja a e e par la fili absorbe ere biodiesel (Inta, 2011 ; Inta, 2008). En ce qui concerne thanol, son obtention correspond, en l’e e sur 325 000 2011, a la canne cultive hectares. Cette surface ne pouvant pas rablement, l’ame lioraaugmenter conside tion des rendements est l’enjeu (cf., par exemple, les recherches de la station rimentale agronomique d’Obispo expe Colombres, dans la province de Tucuman). Des producteurs agricoles aux stationsservice, en passant par l’industrie re et les entreprises pe trolie res huilie es de faire le m (charge elange carburants fossiles-biocarburants), et sans ^ le normatif et incitatif de oublier le ro l’ Etat, toute une chaı̂ne d’acteurs est impliqu ee dans la production et dans des biocarburants la mise en marche argentins, dont en premier lieu le biodiesel de soja. des acteurs, Diversite concentration bouche s des de Des acteurs multiples Tandis que les plus grandes usines es sont la proprie te actuellement habilite des acteurs de la trituration : Vicentı́n, Aceitera General Deheza, Molinos Rı́o de la Plata, d’autres, d’une taille petite t e pionnie res en ou moyenne, ont e re : Soyenergy, Pitey, Diaser, la matie Biomadero ou AOM. Selon qu’elles produisent ou pas l’huile cessaire, la CADER (Ca mara brute ne Argentina de Energı́as Renovables) disgories d’usines de tingue trois cate biodiesel (tableau 1, figure 1) : 1) les grandes usines de biodiesel pendantes car le fait d’acteurs de inde re : leur capacite de l’industrie huilie s importante (de fabrication est tre 63 000 a 480 000 tonnes de capacite annuelle install ee) et elles disposent de leur propre huile brute ; 2) les autres grandes usines avec une de fabrication e galement capacite importante (de 50 000 a 250 000 tonnes) et qui peuvent se procurer l’huile cessaire assez facilement (proximite ne ographique ou organisationnelle) ; et ge 3) les moyennes et petites usines : leur de fabrication est moindre capacite (en-dessous de 50 000 tonnes de installe e) et elles ne produisent capacite pas d’huile. s L’ensemble de cette infrastructure a tre vite hiss e l’Argentine parmi les quatre plus grands producteurs de biodiesel du monde et lui a permis de devenir tout aussi rapidement le premier exportateur (Rozemberg et al., 2009 ; IICA, s 2010). Or, des investissements tre cents ont augmente les capacite s re s d’Explora et de Rosario Bio des unite Energy. Trois autres grandes usines ont te homologu de e ees : Cargill (capacite OCL VOL. 19 N8 3 mai-juin 2012 187 taire Groupe ou proprie Localisation LDC Argentina Joint-venture AGD-Bunge Groupe Molinos Rio de la Plata Vicentin Louis Dreyfus SA Ecofuel SA Molinos Rio de la Plata SA Vicentin SA Groupe Lucci (Citrusvil) Groupe chilien Meck Derivados San Luis Biomadero Oil Fox Viluco SA Explora SA Diaser SA Biomadero SA Oil Fox SA Groupe Petrolera Argentina Maikop SA Rosario Bio Energy SA Groupe Buquebus Advanced Organic Materials SA ** Roldan (Prov. de Santa Fe) 36 000 40 000 48 000 Plaza Huincul n) (Prov. de Neuque Pilar (Prov. de Buenos Aires) 50 000 50 000 Chabas (Prov. de Santa Fe) Daireaux (Prov. de Buenos Aires) 72 000 96 000 36 000 40 000 48 000 50 000 50 000 45 277 83 203 93 875 120 000 117 082 200 000 122 537 49 241 48 841 41 217 45 428 44 398 51 016 Quote-part du national marche (B7) * 230 000 250 000 63 400 100 000 240 000 305 000 480 000 Capacite e (Tn) installe Villa Madero (Prov. de Buenos Aires) San Luis Port San Martin (Prov. de Santa Fe) Frias, Santiago del Estero Terminal 6 (Port San Martin) (Prov. de Santa Fe) Port San Lorenzo (Prov. de Santa Fe) Avellaneda (Prov. de Santa Fe) Santa Clara (Prov. de Santa Fe) Terminal 6, Port San Martin (Prov. de Santa Fe) Port General Lagos (Prov. de Santa Fe) Port San Lorenzo (Prov. de Santa Fe) tent l’huile brute Usines moyennes et petites qui ache Aripar Cereales Groupe Eunerkian Unitec Bio SA Aripar Cereales SA Cazenave & Asociados et Energı́a & Soluciones Patagonia Bionergı́a SA s facile a l’huile brute Usines grandes et avec acce Joint-venture Glencore – Vicentin - Molinos RDP Renova SA pendantes (huile brute a disposition) Usines grandes et inde Nom de l’usine Tableau 1. La production de biodiesel de soja en Argentine en 2010 : acteurs, localisation, capacite , de bouche s. 0 0 0 0 0 26 723 12 797 26 125 82 918 107 463 200 759 14 559 58 783 194 572 260 602 428 984 Disponibilite pour exportation 100 % 100 % 100 % 100 % 100 % 62,88 % 86,66 % 78,22 % 58,54 % 53,27 % 19,69 % 77,03 % 41,21 % 18,92 % 14,55 % 10,62 % % de la capacite e a destine la quote-part 3,35 % 3,72 % 4,47 % 4,66 % 4,66 % 4,22 % 7,76 % 8,76 % 10,92 % 11,43 % 4,59 % 4,56 % 3,85 % 4,24 % 4,14 % 4,75 % % de la quote-part totale * de 240 000 t/an en 2011. Capacite de 49 000 t/an en 2011. Capacite Source : a partir de CADER 2010 et 2011, et Hinrichsen, 2011. Des marches polarise s OCL VOL. 19 N8 3 mai-juin 2012 ** 1 072 715 2 487 000 1 414 285 0,89% 100 % 9 600 Piamonte (Prov. de Santa Fe) ERA SRL 9 600 0 0,9 % 100 % Tablada (Prov. de Buenos Aires) New Fuel SA 10 000 10 000 0 0,9 % 100 % Bella Vista (Prov. de Buenos Aires) Ecopor SA 10 200 10 200 0 1,00 % 100 % Aldea Ma Luisa (Prov. d’Entre-Rios) Hector Bolzan y Cia 10 800 10 800 0 1,67 % 100 % Villa Astolfi (Prov. de Buenos Aires) Soyenergy SA 18 000 18 000 0 1,67 % 100 % Villa Mercedes (Prov. de San Luis) Pitey SA 18 000 18 000 0 2,79 % 100 % Gral Alvear (Prov. de Santa Fe) Diferoil SA 30 000 30 000 0 % de la quote-part totale % de la capacite e a destine la quote-part Disponibilite pour exportation Quote-part du national marche (B7) Capacite e (Tn) installe Localisation taire Groupe ou proprie Nom de l’usine Tableau 1. (Suite ) 188 me usine 240 000 T/an) ; la deuxie d’Unitec Bio SA dans le Terminal 6 sur le Paran a (Port de General San Martı́n dans la Province de Santa Fe) (capacite de 220 000 t/an) et BH Biocarburants SRL en Calchaquı́ (Province de Santa Fe) de 4 000 t/an). En conse (capacite totale installe e en quence, la capacite passe les 3 milArgentine, en 2011, de s les lions de t/an (Cader, 2011) et, d’apre s, elle projets d’investissements annonce devrait passer a 3,5 millions de tonnes par an en 2012 et pourrait d epasser a court terme 5,5 millions de tonnes par an. Jusqu’en 2010, la production de biodiees sel de ces usines homologue etait e dans sa totalite aux exportadestine butent en 2006 pour tions. Celles-ci de 200 millions de dollars7 et atteignent 268 millions de dollars en 2007. Les taient les Etats-Unis et l’Allemagne e deux destinations essentielles, avec respectivement 73 % et 27 % des bouche s. Les taxes sur les exportade te tions, dites « retenciones » et qui ont e introduites en 2003 ont un niveau re rent selon la commodite consid diffe er ee. Ainsi, en 2007, elles atteignaient 5 % pour le biodiesel de soja contre plus de 30 % pour l’huile brute, ce qui constitue une incitation du gouvernement a exporter le biocarburant. plus En 2007, l’Argentine a exporte de 168 000 tonnes de biodiesel, soit quivalent du total de sa production. En l’e 2008 et 2009, les volumes sont bien plus importants (725 000 t et 1,1 million de t respectivement). En 2010, le lancement national capte environ un du marche quart de la production argentine de biodiesel alors que 1,4 million de tonnes es (Sanchez, 2011). En sont exporte 2011, sur 2,4 millions de tonnes de te biodiesel produites, 1,5 million ont e es. La plus grande partie des exporte exportations prend le chemin de l’Union enne et le reste est destine au europe P erou. De plus, les exportations ne le fait que cessent d’augmenter malgre les taxes a l’exportation sur le biodiesel es de 5 % en 2007 soient passe a 20 % en 2008. se, au de but du de veloppeEn synthe ment de la production de biocarburants en Argentine, en 2007, beaucoup 7 tariat argentin a l’Agriculture. Secre Espirito Santo PARAGUAY Jujuy Sao Paulo Formosa Salta Rio de Janeiro CHILI Parana Tucumán Sta Catarina Santiago Chaco Misiones Catamarca del Santa Corrientes 12 Estero Fe 1 Rio Grande La Rioja do Sul Entre Córdoba 7 21 8 3 San Juan 23Ríos Usines de bioethanol 9 2 5 San Luis Exportatrices de biodiesel avec de I’huile brute à disposition 16 6 URUGUAY 10 11 15 4 1) Vicentín (Avellaneda, Santa Fe) 18 24 Mendoza 14 2) Renova (Port San Lorenzo, Santa Fe) 13 22 20 La Pampa 19 Buenos Aires ARGENTINA 17 Neuquén Rio Negro Chubut Santa Cruz Tierra del Fuego 0 250km 3) Ecofuel (Port General San Martin, Santa Fe) 4) LDC Argentina (Port General Lagos, Santa Fe) 5) Molinos RDL (Santa Clara, Santa Fe) 6) Cargill (Villa Gobernador Gálvez, Santa Fe) Exportatrices de biodiesel avec accès facile à I’huile brute 7) Unitec Bio (Port General San Martín, Santa Fe) 8) Explora (Port General San Martín, Santa Fe) 9) Patagonia Bioenergía (Port San Lorenzo, Santa Fe) Fournisseur de biodiesel au marché national (résolution 7 B5) 10) Diaser (Parque Industrial San Luis) 11 ) Pitey (Mercedes, San Luis) 12) Viluco (Frías, Santiago del Estero) 13) Ecopor (Bella Vista, San Miguel, Buenos Aires) 14) Soy Energy (Pilar, Buenos Aires) 15) Diferoil (General Alvear, Santa Fe) 16) Rosario Bioenergy (Roldán, Santa Fe) 17) Maikop (Plaza Huincul, Neuquén) 18) Advanced Organic Materials AOM (Pilar, Buenos Aires) 19) Aripar Cereales (Daireaux, Buenos Aires) 20) Biomadero (La Matanza, Buenos Aires) Fournisseur de biodiesel au marché national 554 (corte 7%) 21) Energías Renovables Argentinas ERA (Piamonte, Santa Fe) 22) New Fuel (La Tablada, Buenos Aires) 23) Héctor Bolzán y Cia. (Aldea María Luisa, E Rios) 24) Oilfox (Parque Ind. Comirsa, Ramallo). Figure 1. Localisation en Argentine des usines de biodiesel de soja habilite es en 2010. taient en l’etat d’usines de biodiesel e de projet. Les plus petites couvraient, res sans respecter parfois certains crite , l’autoconsommation et une de qualite petite demande locale en manque de glementation. Ce n’est qu’avec la re solution 7/10 de fevrier 2010 du re tariat de l’e nergie du ministe re de Secre de rale, des Investissela Planification fe te ments publics et des Services qu’ont e connus le volume necessaire pour l’incorporation obligatoire de 5 % de biodiesel (B5) dans le gazole, soit 859 819 tonnes pour 2010, les quotas pour chacune des 19 usines (sur la base de leur proposition) et la formule de calcul du prix d’achat troliers charges de par les acteurs pe aliser le melange. En juillet 2010, le re , a secretariat de l’Energie a augmente solution 554/2010, la valeur travers la re lange du me a hauteur de 7 % (B7) : 23 es en 2011, afin usines sont donc habilite trolie res de fournir aux entreprises pe les 1 072 715 tonnes n ecessaires a ce national captif. marche Le gouvernement affiche maintenant sa d’atteindre 10 % de biodiesel volonte hicules dans le carburant pour les ve troliers sont (B10). Mais les acteurs pe ticents : au-del assez re a des changecesments logistiques et techniques ne par le saires, le prix du biodiesel – fixe tariat de l’ secre Energie, est plus eleve que celui du gazole (respectivement 5,24 et 4,2 pesos argentins le litre). Du coup, alors que les entreprises se retrodents de biodiesel, il uvent avec des exce nuries re currentes y a des pe a la pompe, ce qui oblige a importer du gazole leo, gas & (Revista « Petroquı́mica, petro quı́mica », 2011). La situation est simile le laire a celle de la France, ce qui r eve re assez ambigu de l’articulation caracte entre des mondes productifs et des enjeux a priori difficilement conciliables (Guind e et al., 2008 ; Jacquet et al., ce propos, il convient ici de 2007). A souligner le type de relations entre les producteurs de biodiesel et les acteurs re pe tro-chimique. Les entrede la filie dent des raffineries prises qui posse troli pe eres n’ont pas investi pour obtenir le biocarburant dont l’incorporation est obligatoire. Elles se fournissent en s des acteurs biodiesel aupre a qui elles thanol n proposent le me ecessaire et avec lesquels elles passent contrat et alisent le me lange. Ainsi, les quelques re s par projets d’investissement annonce OCL VOL. 19 N8 3 mai-juin 2012 189 trolie res pre sentes en les compagnies pe s, ce Argentine ne se sont pas concretise ^ le clair a chaque qui attribue un ro acteur : le biodiesel de soja est un input aux acteurs des carburants et propose nergies par ceux lie s au secteur des e agricole, la relation existant aussi en amont (dans l’autre sens) du fait thanol. de l’approvisionnement en me tariat a l’Energie – en tant Le Secre qu’autorite d’application de la Loi 20093 – coordonne l’ensemble des s de la filie re, le Ministe re de activite conomie agissant en tant qu’autorite l’e d’application pour des questions fiscales. des En ce qui concerne la qualite biocarburants, l’Argentine remplit les normes exigees a l’international. L’importation de technologies de pointe (d’Allemagne ou des Etats-Unis) et le s/Institut national partenariat Universite de la recherche agronomique (INTA)/ s conduisent a la mise en acteurs prive oeuvre de protocoles de production en accord avec ces normes. La plupart des res technolousines utilisent les dernie gies (allemandes) et les chercheurs argentins travaillent a la mise au point conomes en eau et en de process e produits chimiques (methanol, soude caustique, additifs). Par exemple, un rimente producteur argentin a expe l’obtention de biodiesel en utilisant des ultrasons. De même, certains produisent l’huile brute de soja ou de colza par pression, ce qui permet de s’exemptape d’extraction du solvant. ter de l’e flexions finales Re es, premier Devenue, en quelques anne me proexportateur mondial et quatrie ducteur mondial de biodiesel de soja, l’Argentine poursuit depuis 2006 le veloppement de la production de de biocarburants, en stimulant l’augmentation des volumes, la diversification des produits et la multiplication des usages. Les incitations fiscales et la repartition nominative des quotas jouent en faveur de cette progression rapide, respectives international et ment sur les marche national. Lors de son adoption, la loi-cadre te pre sente e comme un 26093/06 a e veloppement des e conomies outil de de gionales (hors re gion de la Pampa), re es a une absence de cre ation confronte e dans le domaine de valeur ajoute quemment touchees par agricole et fre nurie de produits e nerge tiques. la pe 190 OCL VOL. 19 N8 3 mai-juin 2012 Neanmoins, les initiatives qui ont diatement surgi ont confirme la imme vidente, tendance, somme toute e a la concentration spatiale au profit de l’industrie de trituration de grande chelle localise e dans les terminaux e portuaires sur le Paran a, ce qui va dans le sens d’une valorisation accrue de ses s agro-industrielles et agroactivite exportatrices. glementaires qui ont Les vicissitudes re bouche , de but 2010, suivi ont enfin de finition des modalite s du sur la de national : r marche epartition des quotas, , pourcentage prix, normes de qualite lange. Dans ce climat d’incertide me tude, les acteurs locaux, de moyenne a s par l’approvisionpetite taille, et attire national, ont du ^ nement du marche attendre. L’attribution des quotas en galement, une place sur 2010 donne, e ce march e interne aux grandes usines es vers l’exportation, ce qui leur tourne ne ficier du prix fixe par le permet de be gouvernement et d’atteindre les volumes cessaires pour le me lange ne a 7 %. Si les contours legislatifs et les choix des politiques actuels ont façonne s commerciales capte es par opportunite rateurs localise s dans les les grands ope s terminaux portuaires voue a l’exportaveloppement tion, et si les objectifs de de gional, qui articulaient production, re approvisionnement local et cr eation de e, semblent bien loin et valeur ajoute vent de l’illusion, on constate malgre rele tout l’affirmation d’une fili ere qui tend a tendre spatialement, a multiplier les s’e initiatives commerciales et a dynamiser les innovations scientifiques. La diminunerg ^ t de la facture e tion du cou etique et la diversification des sources renforcent l’interêt national pour appuyer la production de biocarburants. gislatif et les d s qui Le cadre le ebouche te de termine s par volonte politique, ont e aussi bien au niveau national qu’internaation tional, appuient finalement la cre re argentine d’une certaine d’une filie ampleur, sur la base de productions agricoles et agro-industrielles pourvoyeuses des inputs de base (Rastoin et Ghersi, 2010). S’ajoute a la consolidation cente de la fili re ere du biodiesel, l’augthanol de mentation des productions d’e canne (sur la base d’une vingtaine de res) et de maı̈s (cinq centrales sucrie thanol de maı̈s viennent d’être projets d’e s et la mise en fonctionnement approuve ^ t 2012 de ces usines aurait lieu entre aou et mai 2013). anmoins, il est permis d’être circonsNe e annonce e de ces pect face a la porte veloppements, tant ils sont pris entre de s. En Europe, incertitudes et ambiguı̈te bouche principal actuel de l’Argende tine, des restrictions conjoncturelles sont es en matie re d’importations afin avance de favoriser les industries nationales (exemple de l’Espagne). Sur le fond, les nergies dites « renouvelables » agro-e es quant sont questionne a leur viabilite environnementale (Le Hir, 2011 ; The Journal of Peasant Studies (2010) et quant a l’acceptation sociale de l’obtennerg tion de produits agro-e etiques, autriment) de biens alimendel a (ou au de taires. Ces incertitudes ne laissent pas rents les acteurs qui oeuvrent en indiffe j Argentine, d’autant qu’ils sont de a s entre des re gles nationales ballote duite actuellement favorables (taxe re sur les exportations de biodiesel, mais jusqu’ a quand ?) et des revendications chelle locale transversales (de l’e a chelle mondiale) d’ordre environnel’e conomique et social. La mise en mental, e cause de la culture en continu, la d eforesnerge titation, le niveau de rendement e , s e nerge tique que, la rentabilite ecurite curite alimentaire : ces dimensions vs se nerge tique sont essende la transition e tielles, tout comme celle de la maı̂trise des consommations. RÉFÉRENCES Andrich M (comp.). Biocombustibles, energı́a y alimentos. Buenos Aires : Ed: Antropofagia, 2011. CADER, Estado de la industria argentina de biochimie. Reporte Cuarto Trimestre 2010: Corte obligatorio de biodiesel ampliado a B7; GENREN y los biocombustibles; ranking n. Buenos Aires, mundial de produccio 2011. http://www.argentinarenovables.org/ archivos/Estado-Industria-Biodiesel-enero2011. pdf. CADER (Camara argentina de energı́as renovables). Comercio en biodiesel entre Argentina y Europa: propuestas para el desarrollo transparente de una industria. Buenos Aires : 2010. http://www.argentinarenovables.org/informes_ estudios_ensayos.php. Carrizo S. 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